la taxonomie pour un green deal européen. DMF avec UE
Le budget annoncé est conséquent . Les prétendants se bousculent. L’Europe met un préalable : une taxonomie déterminera préalablement à la réception des dossiers quel type d’activité sera considérée comme verte, n’aggravant pas le changement climatique et pouvant bénéficier d’un éventuel soutien des investisseurs. Il s’agissait de construire une sorte de texte boussole en conformité avec le pacte vert défini par l’Europe et l’accord de Paris.
Cette classification et ces informations rendues publiques ont plutôt pour objectif de tracer les flux d’argents investis dans l’économie réelle afin de mesurer leur impact environnemental. Et, in fine, de parvenir à favoriser les investissements bénéfiques à la planète au détriment de ceux qui lui sont nocifs. Dans cette optique, la Banque européenne d’investissement et la Banque mondiale avaient déjà créé en 2007 des “green bonds” — ou obligations vertes — des actifs financiers placés dans des activités œuvrant à la préservation de l’environnement. Soit ce que l’accord de Paris définit comme la finance verte.
Pour travailler à la définition des seuils de cette taxonomie, un groupe technique de 35 experts a été monté par la Commission européenne. 20 mois durant, les participants, issus de grandes banques, de compagnies d’assurances, de places boursières, de groupements d’intérêts ou lobbies, de think tanks, d’universités et d’ONG ont débattu puis publié un rapport en mars 2020. Ce texte couvre 70 secteurs d’activité économique représentant 93 % des gaz à effet de serre émis sur le territoire de l’Union. seules les activités émettant moins de 100g de CO2 par kWh entrent dans le cadre de la taxonomie verte. Un seuil qui exclut de fait les secteurs liés aux combustibles fossiles solides — tel que le charbon — mais aussi le gaz et le nucléaire.
Au départ tout allait bien et trois mois plus tard, en juin 2020, le Parlement européen adoptait un règlement pour prévenir l’éco-blanchiment — ou greenwashing. Les activités bénéficiant de ce label doivent contribuer au moins à l’un des six objectifs de la finance verte – atténuer le changement climatique ou s’y adapter, faire un usage durable des ressources d’eau, participer à l’épanouissement de la biodiversité, respecter les règles de l’économie circulaire et prévenir et contrôler les risques de pollution — sans porter atteinte aux cinq autres.
Mais à cette première catégorie deux autres, plus extensives, sont venues s’ajouter rentrant dans le cadre de la taxonomie verte. D’une part les activités de transition pour lesquelles il n’existe pas de solution de remplacement bas carbone, mais dont les émissions de gaz à effet de serre correspondent aux meilleures performances du secteur, et qui s’inscrivent dans une trajectoire de décarbonation. De l’autre, les activités habilitantes, qui produisent de fortes émissions carbone mais permettent le développement de secteurs durables (qui permettent par exemple de fournir les composants ou les combustibles nécessaires à certaines filières) Concrètement, cela signifie qu’une activité économique émettant plus de 100g de CO2 par kWh peut être intégrée à la taxonomie verte, si elle vient en remplacer une autre au bilan carbone plus élevé encore.
Le texte est donc voté, mais le périmètre de la taxonomie continue à faire débat car gaz, et nucléaire pourraient bien être réintégrés selon ces nouveaux critères. Ce que refusent bien sûr 130 ONG qui ont publié un rapport dénonçant l’influence de plusieurs secteurs industriels et énergétiques. Face au tolé , la décision est remise à fin 2022 .Elle pourrait échapper au vote du parlement et être prise sous forme d’actes délégués La Commission européenne doit également composer avec la pression politique exercée par les Etats membres. 10 d’entre eux, dont la Pologne, poussent pour que le gaz soit considéré comme combustible de transition. Tandis que dans une lettre adressée à Bruxelles, Paris, Bucarest et Varsovie ont également souligné “l’indispensable contribution (du nucléaire) pour combattre le changement climatique”.
Une autre menace pèse et le WWF a choisi de quitter la discussion suite à cela Alors que la Commission souligne elle-même les limites de l’énergie issue de la biomasse, les actes délégués l’incluent parmi les énergies intégrées à la taxonomie verte. Le rapport préconisait de ne pas toucher aux arbres pendant 20 ans au moins. Cette recommandation ne serait plus pour l’instant retenue.
Autre chantier sujet à discussions, la définition d’une taxonomie brune, qui consisterait à l’inverse à définir le champ des activités économiques accélérant le réchauffement climatique. Cette initiative, soutenue par les ONG de défense de l’environnement, est également portée par la Banque centrale européenne. La Commission européenne doit pour sa part produire un rapport sur la question d’ici au 31 décembre 2021.