Les premiers apports à la question de l’adaptation (cf sortie du rapport livre 2 GIEC): usine à GES, ADEME, Greenpeace
Qu’est-ce que l’adaptation au changement climatique ? L’adaptation au changement climatique correspond à l’ensemble des évolutions politiques, techniques, institutionnelles, sociétales et comportementales que les sociétés dans leur ensemble, ou plus spécifiquement les acteurs d’un secteur, devront conduire pour limiter les impacts négatifs du changement climatique. VU Dans l’usine à GES de ce jour (auteur valery laramée) Malgré ses plans nationaux, la France n’est pas capable de s’adapter aux effets annoncés d’un réchauffement rapide. En France, on ne s’adapte pas beaucoup aux effets des changements climatiques, mais on a des idées. Telle pourrait être résumée la situation de l’Hexagone et des territoires ultra-marins à l’aune de la montée du risque climatique. Moindre accès à l’eau, développement des risques de feux dans les espaces naturels, mouvements de sols, effets sanitaires, inondations, montée du niveau de l’océan, événements météorologiques extrêmes, impacts sur les infrastructures : les risques climatiques pesant sur la France ont été identifiés de longue date par les scientifiques et même par quelques (rares) politiques, comme le sénateur écologiste Ronan Dantec. Deux PNACC, bientôt trois Officiellement, les gouvernements ont pris le taureau climatique par les cornes. Ces 10 dernières années, deux plans nationaux d’adaptation au changement climatique (PNACC) ont été publiés. Très insuffisants : ils visent à s’adapter aux effets d’un réchauffement qui ne dépasserait pas les +2 °C. Le troisième est en cours d’élaboration. Légalement, il doit être publié d’ici à l’été 2023. Est-ce rassurant ? En juin 2021, le Haut conseil pour le climat (HCC) tirait la sonnette d’alarme. Dans son rapport annuel, l’organe chargé de conseiller le gouvernement souligne que les deux-tiers de la population française sont déjà fortement ou très fortement exposés au risque climatique. L’équipe présidée par la climatologue Corinne Le Quéré appelle aussi l’Etat à l’action : « l’adaptation au changement climatique ne peut plus se réduire à des réponses ponctuelles et réactives mais doit devenir transformationnelle et proactive, pour anticiper sur la poursuite des conséquences du changement climatique qui sort des plages de variabilité naturelle et dont les effets sont déjà visibles. » Nous en sommes loin. Initiatives sectorielles et locales Cela ne signifie pas que rien ne bouge. Ponctuellement, des territoires, des Régions, des secteurs d’activité comme la viticulture ou des collectivités, des urbanistes s’organisent pour anticiper les risques annoncés. Ils ne sont pas seuls : le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema) a récemment été bombardé sherpa « adaptation » des collectivités. « Il y a de plus en plus d’acteurs qui se mobilisent ou sont prêts à bouger, reconnaît Vivian Despoues. Mais, les initiatives manquent souvent de profondeur. La RE2020 prend ainsi en compte le confort d’été, mais en se basant sur la canicule de 2003. Or, de tels niveaux de température seront normaux dans quelques années », rappelle le chef de projet Adaptation de l’Institut pour l’économie du climat (I4CE). Autre sujet d’inquiétude : la non prise en compte des effets du réchauffement dans les opérations d’urbanisme. Côté agricole, les experts sont loin d’être convaincus par les conclusions qu’a tirées le gouvernement du récent Varenne agricole de l’eau. Menaces sur le littoral Ce n’est guère mieux sur le littoral. Une étude publiée, la semaine passée, par Callendar montre les effets inattendus du grignotage du continent par l’océan. En passant au crible de ses outils d’évaluation des risques 16 millions de transactions immobilières conclues entre le 1er juillet 2016 et le 30 juin 2021, le cabinet d’intelligence climatique montre que 15 000 ventes, principalement sur la côte atlantique et dans l’embouchure de la Seine, concernent des biens qui seront inondables avant le milieu du siècle. Perte annoncée : 5 milliards d’euros ! Restaurer les écosystèmes protecteurs Or, à la montée du niveau de la mer se conjuguent les effets de l’érosion (éolienne et hydrique), de l’artificialisation des sols, de l’acidification des eaux, de la baisse du taux d’oxygène et de la montée en température. « L’ensemble des paramètres physicochimiques de ces milieux sont bouleversés », indique Jill Madelenat. Se protéger efficacement suppose de redonner vie aux écosystèmes (cordons dunaires, marais littoraux) qui, naturellement, nous protègent des assauts de la mer. « Il faudra aussi penser à des stratégies de retraite. Ce qui n’a rien d’évident dans un contexte de rareté du foncier, d’artificialisation des sols », poursuit la chargée d’études à la Fabrique écologique, un think tank. Les élus locaux y sont d’ailleurs très réticents. Devant la mauvaise volonté des 303 maires concernés à publier leur Plan prévention des risques littoraux, l’Etat a repris la main. La loi Climat et Résilience l’oblige désormais à cartographier les zones à risque. Il faudra faire davantage. D’ores et déjà la question de l’urbanisation des bandes côtières est posée. « La littoralisation n’est pas compatible avec la prévention des risques qui s’accroissent très fortement », s’alarme Alexandre Magnan, géographe à l’IDDRI et co-auteur du volet 2 du 6e rapport du Giec. On pourrait aussi évoquer les effets du réchauffement sur la forêt. D’ores et déjà, l’ONF estime à 300 000 hectares la surface forestière touchée par les dépérissements imputables au réchauffement. « Or, l’Etat ne prévoit d’investir que 150 millions d’euros par an. C’est insuffisant », estime Vivian Despoues. Les chercheurs plaident tous en faveur d’un « moment politique de l’adaptation ». Avec des arguments à la clé : « le risque climatique va doubler ou quadrupler d’ici la fin du siècle, selon les scénarios d’émissions. Or, s’adapter peut réduire le risque climatique », martèle Alexandre Magnan. Le gouvernement met en place les groupes de travail qui devront rédiger le 3e PNACC et la future loi sur l’énergie et le climat. Sera-ce suffisant pour mobiliser dans la durée tous les acteurs publics et privés concernés ? |
l’ADEME:
La nécessité d’adaptation du secteur agricole face à l’urgence climatique
Le changement climatique est aujourd’hui un fait avéré, et va se poursuivre dans les prochaines décennies. L’enjeu est désormais de conjuguer deux actions : tout mettre en œuvre pour atténuer le changement climatique et également savoir comment répondre à ses conéquences. La récurrence des événements climatiques catastrophiques de ces dernières années a profondément touché les secteurs agricole et forestier et a donné à voir un véritable changement climatique. Les secteurs agricole et forestier, particulièrement exposés à des évènements climatiques répétés, prennent pleinement conscience du coût des impacts actuels du changement climatique.
Des solutions existent déjà et sont accessibles, mais sont pour la plupart des solutions à court terme mises en œuvre en réaction à ces catastrophes, tandis qu’il faudrait aussi les intégrer sur un horizon de long terme. Cette anticipation est notamment nécessaire pour préparer les systèmes de production aux évolutions climatiques attendues, minimiser les dommages et relativiser le coût des actions à mettre en place.
Actuellement, les démarches d’adaptation sont mises en place de manière hétérogène d’une filière à l’autre. Par exemple, elles semblent occuper une place plus importante dans les filières vigne/vin, bovin lait ou encore les grandes cultures du secteur agricole. Dans le secteur forestier également, les démarches d’aptation sont bien présentes où les projets sont articulés autour de l’amont forestier d’essences spécifiques (frênes, chênes, hêtres, résineux, etc.) ou sur le choix des essences.
Les démarches pour aider les mondes agricole et forestier à s’adapter à l’urgence climatique
Afin d’accélérer l’adaptation des mondes agricole et forestier au changement climatique, il faut combiner plusieurs dimensions :
- Une démarche d’anticipation visant à organiser dès aujourd’hui la résilience des territoires et filières aux impacts négatifs du changement climatique et en saisir les opportunités,
- Une action collective regroupant tous les acteurs d’une filière ou de tout un secteur d’un territoire pour mieux comprendre les forces et les fragilités de la filière/du secteur et de ses composantes,
- Une approche en synergie avec l’atténuation au changement climatique et la préservation de la biodiversité.
L’ADEME a recensé dans son étude une centaine de démarches d’adaptation dans ces secteurs, aux niveaux national, européen, et international, avant d’en sélectionner 8 (4 dans le secteur agricole, 4 dans le secteur forestier) qu’elle a analysées pour mettre en évidence les facteurs clés de la mobilisation des acteurs sur cet enjeu, jusqu’à la mise en œuvre d’actions concrètes.
En s’appuyant sur l’analyse de ces démarches, l’agence a ensuite identifié 8 recommandations à destination des acteurs des secteurs et filières et des décideurs publics en vue d’initier et accompagner de nouvelles démarches.
Huits recommandations pour des démarches d’adaptation des mondes agricole et forestier au changement climatique
- Définir l’échelle de travail la plus adaptée : entre filière et/ou territoire
- S’appuyer sur les signes de qualité (AOC, AOP, …), sources de meilleure valorisation économique et peu délocalisables du fait du lien existant entre la qualité et le territoire
- Accompagner la prise de conscience des consommateurs et citoyens qui par leur demande et leurs attentes agissent sur les autres maillons (production, transformation, distribution)
- Construire une vision commune autour de l’adaptation, associant les acteurs de l’amont et de l’aval
- Agir à l’échelle des massifs forestiers homogènes (du point de vue sylvoclimatique, c’est-à-dire au niveau de la typologie des peuplements, des sols et du climat, et de la gouvernance des acteurs)
- Mettre en place une concertation pour définir comment favoriser la résilience
- S’appuyer sur les structures de portage existantes (autant que possible)
- Faciliter la mobilisation, l’appropriation des enjeux et le passage à l’action
- S’appuyer sur des acteurs motivés et légitimes
- Créer une nouvelle structure quand cela apparait nécessaire
- Raconter le futur, esquisser les chemins possibles en partant d’un diagnostic de l’état actuel
- Visualiser de manière concrète et directe l’environnement climatique
- Illustrer l’incertitude sur les scénarios climatiques en donnant à voir un horizon opérationnel de court terme et un horizon à plus long terme pour anticiper les transformations nécessaires
- Faire prendre conscience que l’inaction n’est pas un chemin possible
- Proposer des trajectoires « sans regrets » à court terme, pour favoriser des systèmes plus résilients à long terme et en s’appuyant sur des réseaux de suivi pérennes
- S’appuyer sur / et renforcer les réseaux de suivi et des observatoires pérennes des systèmes forestiers et agricoles ainsi que les dispositifs d’expérimentation et de recherche
- Montrer que des réponses accessibles sont disponibles aujourd’hui pour enclencher le passage à l’action, vers une transformation à long terme
- S’appuyer sur des politiques publiques existantes
- Proposer des démarches de co-construction participatives et garder une flexibilité dans la gestion du projet
- Mobiliser les exemples de bonnes pratiques et les connaissances scientifiques et techniques
- S’appuyer sur les réseaux, instances et/ou outils existants de partage de la connaissance et de coopération
- Pour le secteur agricole : outils Agriadapt, CANARI, ORACLE, Clima-XXI, etc.
- Pour le secteur forestier : plateforme CLIMESSENCE, l’outil BIOCLIMSOL, etc.
- Utiliser des outils de sensibilisation et de communication participatifs et engageants
- S’appuyer sur la pédagogie des aléas majeurs comme un argumentaire possible de mobilisation
- Montrer le lien entre changement climatique et répétition/fréquence des évènements passés : le changement climatique c’est ici et maintenant !
- Évaluer les impacts économiques et sociaux des évènements catastrophiques et les mettre en perspective avec les actions pouvant limiter ces risques
- Partager les connaissances : s’appuyer sur la science pour identifier les tendances
- Mettre en place des outils de sensibilisation et de communication participatifs
- Élaborer des politiques de prévention pour minimiser le risque de dégâts en cas d’augmentation des aléas
- Mettre en avant les co-bénéfices créés
- S’appuyer sur les synergies entre les démarches d’adaptation avec les autres démarches (sur l’atténuation au changement climatique, la préservation de la biodiversité, etc.),
- Rappeler qu’il n’y a pas d’atténuation possible en forêt sans assurer la résilience des forêts face aux impacts du changement climatique.
- Développer des approches systémiques, tout en veillant à donner un maximum de lisibilité sur la finalité du projet
- Mettre en avant ces co-bénéfices pour mieux convaincre
- Mobiliser les financements en faveur de l’adaptation
- Proposer des lignes de financement dédiées à la mise en œuvre de l’adaptation
- Lier création de connaissance, élaboration de stratégies et tests d’actions
- Favoriser la prise en compte de l’adaptation au changement climatique en cas de financements publics
Greenpeace:
En août dernier, le GIEC soulignait que les changements climatiques récents à grande échelle étaient d’une nature sans précédent dans toute l’histoire de l’humanité, et qu’ils étaient sans aucun doute liés à l’activité humaine.
En se concentrant sur les impacts, l’adaptation et la vulnérabilité, ce nouveau rapport du GIEC met en évidence à quel point les impacts du dérèglement climatique sont déjà graves, affectant directement des millions de personnes et de nombreux écosystèmes dans le monde entier.
Les inégalités climatiques au grand jour
Ce rapport est un cruel rappel que le réchauffement climatique ne concerne pas uniquement la planète, mais avant tout les personnes qui y vivent, ou, pour beaucoup trop d’entre elles, tentent d’y survivre.
Les limites de l’adaptation sont déjà atteintes, les communautés les plus vulnérables et les moins responsables de la crise climatique sont affectées de manière disproportionnée. Les faits concrets présentés dans ce rapport rendent plus évidents encore le manque d’action et d’engagement des pays les plus émetteurs et la nécessité de justice climatique, plaçant les droits et les besoins des personnes les plus vulnérables au cœur de l’action climatique, encore plus urgent.
« Ce rapport démontre que les changements climatiques nécessitent une réponse globale et une solidarité sans faille entre les États et les populations. Nous devons de toute urgence changer de modèle de société, non seulement en sortant des énergies fossiles ou en privilégiant une agriculture agro-écologique, mais aussi en organisant un partage de l’effort efficace et équitable envers les populations les plus modestes et les plus vulnérables« , souligne Clément Sénéchal, chargé de campagne Climat pour Greenpeace France.
« Les promesses ne sont pas suffisantes pour rattraper le retard sur l’objectif de l’Accord de Paris. Il est temps d’organiser le partage de l’effort de sobriété, grâce à des mesures structurantes qui mettent d’abord à contribution ceux qui émettent le plus de gaz à effet de serre, à savoir la régulation des multinationales et la taxation des flux financiers, ainsi que les catégories les plus riches qui ont une empreinte carbone démesurée à travers leur activité économique. La transition écologique doit être juste ou elle ne se fera pas ».
Depuis le précédent rapport du GIEC, les risques climatiques surviennent désormais plus rapidement et leur gravité sera plus précoce. Le GIEC constate que la mortalité due aux inondations, à la sécheresse et aux tempêtes était 15 fois plus élevée dans les régions déjà très vulnérables lors de la dernière décennie, par rapport aux régions à très faible vulnérabilité. Le rapport reconnaît également l’importance cruciale de lutter en même temps contre les crises du climat et de la biodiversité. Ce n’est qu’en agissant efficacement sur la protection et la restauration des écosystèmes que nous pourrons renforcer leur résilience face au réchauffement climatique et protéger les populations qui en dépendent.
La responsabilité des candidat·es à la présidentielle en jeu
En France, ce rapport est publié en pleine campagne présidentielle, et au moment même où des associations déplorent le peu de place accordé aux questions environnementales dans le débat politique. Quand la question n’est pas tout simplement ignorée, elle est reléguée après 23h, loin des prime time et des éditions spéciales.
Pour Greenpeace, l’ensemble des candidats et candidates doivent s’emparer de cette thématique cruciale pour l’humanité. Or nombreux sont ceux qui passent à côté du sujet ou se limitent à promouvoir de fausses solutions en faisant de l’environnement et du climat un enjeu secondaire et cosmétique.
La présidence de la République a un rôle prépondérant dans les orientations de la puissance publique. Au lendemain du second tour de l’élection présidentielle, le ou la président·e de la République nouvellement élu·e aura la lourde tâche de rattraper le temps perdu sur le front climatique et de sortir notre pays de l’illégalité. Car la France, qui ne respecte pas elle-même l’Accord de Paris sur le climat, a été doublement condamnée en 2021 par la justice dans le cadre de l’affaire de Grande-Synthe et de l’Affaire du Siècle.
La mobilisation climatique ne doit pas faiblir
Les rapports du GIEC sont indispensables aux débats sur les mesures à adopter face aux problématiques urgentes de l’adaptation, des pertes et des dommages. Ils donneront un cadre aux discours de préparation en vue de la Conférence internationale sur le climat, la COP27, qui se déroulera en Égypte en novembre 2022. Les pays devront alors s’engager quant à la révision de leurs objectifs nationaux pour limiter le réchauffement à 1,5°C, conformément à l’Accord de Paris.
« On se méprend trop souvent sur l’état d’avancement du réchauffement climatique et ce rapport du GIEC remet les pendules à l’heure. A force d’inaction, les risques prédits se réalisent et les prévisions s’aggravent. Alors que les impacts sont tangibles pour des millions de personnes, la classe politique au pouvoir refuse toujours d’agir d’agir, rappelle Clément Sénéchal. Nous ne sommes donc pas au début de la catastrophe, mais à un stade critique. Nous avons la chance d’avoir une communauté scientifique qui fait son travail, de manière infatigable, depuis un demi-siècle. Il faut désormais une réaction majeure de la société« .
Des marches climat sont organisées dans toute la France le 12 mars prochain pour porter des demandes fortes et exiger que nos politiques prennent enfin leurs responsabilités.