revoir de fond en comble la gouvernance de l’écologie
“La gouvernance telle qu’elle est organisée aujourd’hui constitue une entrave à des évolutions suffisamment significatives” en matière d’écologie,souligne, dans une note, le Cercle de la réforme de l’État. Pour rectifier le tir, le think tank propose notamment d’agir sur le plan de l’organisation gouvernementale, tant au niveau interministériel que ministériel.
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“La politique que je mènerai dans les cinq ans sera écologique ou ne sera pas”, a lancé Emmanuel Macron lors d’un meeting à Marseille, samedi 17 avril. S’il est réélu, le Président-candidat a notamment promis de nommer un Premier ministre “directement chargé de la planification écologique”, qui serait alors “appuyé par 2 ministres forts” : un ministre “chargé de la planification énergétique” et un ministre “chargé de la planification écologique territoriale”. Un appel du pied aux électeurs de gauche.
Hasard de calendrier : le Cercle de la réforme de l’État vient de publier une note sur le sujet. Il y juge urgent de revoir l’organisation institutionnelle et administrative du pays pour une meilleure prise en compte des enjeux écologiques. À ses yeux en effet, les objectifs décidés par les gouvernements successifs en matière d’écologie n’ont pas été atteints dans leur quasi-totalité.
“La gouvernance telle qu’elle est organisée aujourd’hui constitue une entrave à des évolutions suffisamment significatives, souligne ce think tank composé de hauts fonctionnaires et d’universitaires. Il y a urgence à la faire évoluer car l’écart trop constant qu’elle contribue à perpétuer entre les objectifs et les actions engagées, entre celles-ci et les réalisations effectives, porte atteinte à la crédibilité de l’action publique.” “La manière dont la prise en charge de la transition écologique est organisée aujourd’hui rend improbable toute évolution significative en vue de l’atteinte des objectifs”, poursuit le Cercle de la réforme de l’État dans sa note intitulée “Gouvernance de l’écologie : alerter et construire” [cliquez ici pour la consulter]. À lire aussi :Les “plans climat” des ministères ne convainquent pas
Aux yeux du Cercle, l’État “et plus largement la puissance publique (n’est) pas actuellement en mesure de mener (une) action d’ampleur suffisante” en matière d’écologie. L’occasion pour le think tank de désigner plusieurs sources de difficultés : une “absence de cohérence dans l’organisation, sans schéma d’ensemble, avec un entrelacs de missions, des juxtapositions d’organismes et de compétences”, ainsi que des “enjeux en jachère”.
Un “ministère du Possible”
Le think tank ne nie pas que le “parti pris de l’intégration des enjeux environnementaux (aie) permis de réelles avancées” dans le cadre, notamment, de l’impulsion donnée par le Grenelle de l’environnement de 2007. Reste que la mobilisation et l’intégration ont, depuis, “rencontré des limites, aujourd’hui exacerbées” selon le Cercle : “L’impulsion politique a parfois manqué mais les conditions d’élaboration et de mise en œuvre des plans nationaux nécessitant la collaboration entre institutions font aussi apparaître une difficulté à faire vivre la transversalité de l’action publique.”
Pour rectifier le tir, le Cercle propose notamment d’agir sur le plan de l’organisation gouvernementale, tant au niveau interministériel que ministériel. Près de quarante ans après la création du premier ministère de l’Environnement – qualifié de “ministère de l’Impossible” par son premier titulaire, Robert Poujade –, la mise en place d’un “grand ministère” en 2007, par l’agrégation de plusieurs services ministériels, avait suscité beaucoup d’espoir.
Sa création “constituait une étape méritoire pour une approche plus cohérente et un ministère plus puissant”, estime le think tank. Or, poursuit-il, le retour d’expérience “démontre qu’il ne peut jouer pleinement son rôle que s’il pèse dans les arbitrages gouvernementaux et que si le ministre qui assume cette responsabilité est en mesure d’assurer effectivement la cohérence de toutes les politiques dont il est responsable”.
Un nouveau rôle pour le CGDD
À ce propos, le Cercle préconise notamment de “revisiter” le rôle du Commissariat général au développement durable (CGDD) à “l’intérieur” du ministère de de la Transition écologique, ainsi qu’au “plan interministériel”, pour “qu’il puisse assurer la stratégie à 5-10 ans”. Le think tank relève notamment un “déséquilibre” entre le secrétariat général du ministère – en charge de la coordination des directions d’administration centrale et de la gestion des services déconcentrés – et ce CGDD chargé de l’intégration de l’environnement dans les politiques publiques. Quand le premier coordonne les moyens du ministère, le second ne dispose pas d’un bugdet propre. À lire aussi :Comment le gouvernement compte “verdir” les services de l’État
“Le fonctionnement du CGDD avec les directions verticales du ministère est parfois voisin du fonctionnement entre ministères, tacle le think tank.La dynamique de transversalité indispensable pour que fonctionne le pari fait en 2007, et qui existait au départ, n’a jamais prévalu de façon durable.” Certes, l’organisation en sections et l’ancrage territorial du CGDD “constituent un point de force transversal”, aux yeux du Cercle. Selon lui, malgré tout, cela n’est “évidemment pas suffisant à lui seul” puisque le rôle du commissariat “demeure limité” : “Son intervention pour éclairer les politiques publiques et favoriser leur coordination n’est pas assurée, compte tenu à la fois de son champ de compétences et des moyens humains dont il dispose.”
Le think tank plaide donc pour une “reconnaissance du rôle transversal” du CGDD “pour l’ensemble des politiques du ministère et la nécessité de lui redonner du poids dans les arbitrages, internes et externes”. Il préconise aussi de renforcer les liens entre ce commissariat et Matignon. Pour le Cercle, en effet, le fait que le commissaire général soit également nommé délégué interministériel au développement durable “ne suffit pas à régler la question” de la prise en compte des enjeux écologiques au niveau interministériel.