WWF France attend un « projet sincère et détaillé » d’Emmanuel Macron pour affronter la crise écologique
18h00 , le 19 avril 2022
- Par
- Monique Barbut, présidente du WWF France et Isabelle Autissier, présidente d’honneur du WWF France
TRIBUNE. Monique Barbut, présidente du WWF France et Isabelle Autissier, présidente d’honneur du WWF France, appellent Emmanuel Macron à apporter dès maintenant un nouveau souffle autour de l’écologie. Et à faire barrage à l’extrême droite.
Voici leur tribune : « Depuis dimanche dernier, nous n’avons pas de choix : l’élection d’une présidente d’extrême droite en 2022 ne peut pas être une option. Pas davantage qu’en 2017, pas davantage qu’en 2002. C’est pourquoi, il faut voter résolument contre cette menace. Pour autant, la France ne peut pas non plus souffrir de cinq nouvelles années de petits pas pour l’écologie. Encore moins qu’en 2017, et encore moins qu’en 2002, tant la crise écologique s’est accélérée depuis, tant la fenêtre pour réagir va en se rétrécissant. C’est pourquoi, s’il souhaite l’emporter le 24 avril, le candidat Emmanuel Macron doit encore convaincre les Françaises et les Français soucieux de l’avenir écologique du pays. Après ses premières annonces à Marseille sur l’écologie, le WWF attend qu’il détaille à l’occasion du débat de l’entre-deux-tours plus concrètement sa “planification écologique”.
Empêcher l’extrême droite, dépêcher l’écologie
Grande oubliée de la campagne électorale, et encore absente de la soirée du premier tour, l’écologie s’est progressivement imposée dans le débat politique de l’entre-deux tours. Elle se retrouve désormais au cœur de la victoire disputée par les deux candidats finalistes. D’abord parce qu’elle est une préoccupation constante d’une majorité de Français, déjà éprouvés par une multitude de crises et soucieux d’éviter la brutalité des bouleversements climatiques à venir. Aussi, parce qu’elle a été un critère central des votes en faveur de Jean-Luc Mélenchon et de Yannick Jadot qui s’avèrent aujourd’hui pivots dans la course à l’Elysée. Enfin parce que le projet de Marine Le Pen engagerait d’importants reculs pour la transition et l’influence de la France : sortie du Green Deal européen, assèchement des contributions françaises au Fonds vert pour le climat, démantèlement des éoliennes déjà installées en France, poursuite du tout-automobile et détaxation de l’impôt sur les carburants.
Dans ce contexte, l’écologie ne doit pas être mobilisée à des fins électorales sans lendemain. Elle doit être au cœur du projet social et économique du prochain président. C’est le sens de l’alerte lancée par le WWF : le candidat Emmanuel Macron fait face au double défi d’une extrême-droite en capacité de l’emporter et d’une crise écologique en passe de s’emballer. Il devra assumer la double responsabilité d’un barrage à l’extrême droite et d’un redressement écologique d’ampleur.
Les dossiers qui attendent déjà sur le bureau du président de la République
Un petit pas, une demi-mesure, une annonce, une reculade : la méthode du précédent quinquennat n’a pas permis à la France d’atteindre ses objectifs pour l’écologie. Aujourd’hui, l’heure est au changement d’échelle et à la structuration de la transition. Les solutions sont là et ne demandent qu’à être mises en oeuvre pour une “planification écologique” crédible et efficace :
- Discipliner l’Etat pour l’obliger à tenir ses objectifs écologiques. A nouvelle ambition, nouveaux repères : parce que l’écologie doit devenir “la politique des politiques”, le WWF appelle à soumettre chacune des décisions politiques à l’obtention d’un « passe » pour le climat et la biodiversité, pour éviter les reculs et assurer que toutes les décisions publiques contribuent à atteindre les caps écologiques qui ont été définis.
- Programmer dans la durée le financement de la transition écologique. Parce que la transition manque encore de financements et parce qu’il faut encore cesser de subventionner le grand réchauffement et l’érosion de la biodiversité, le WWF recommande d’adopter une loi de programmation pluriannuelle des finances pour le climat. Le projet de loi de finances de 2023 devra en être la première pierre.
- Planifier la transition écologique dans trois domaines prioritaires : l’agriculture, la nature et l’énergie.
Pour protéger les agriculteurs face aux chocs des prix et à la crise écologique, pour transformer une agriculture conventionnelle aujourd’hui bridée par son empreinte écologique et sa dépendance à l’étranger, le prochain président devra se tourner vers l’agroécologie, dont les pratiques sont toujours plus rentables et attractives. Le WWF propose un “revenu vert” pour accompagner les agriculteurs engagés dans des pratiques respectueuses de l’environnement.
Pour protéger et restaurer la biodiversité, le nouveau président devra intervenir dans tous les secteurs, en interdisant les coupes rases en forêts, en luttant contre la pêche illégale en Guyane et en s’opposant à l’exploitation minière des grands fonds marins.
Pour passer à la sobriété et libérer les énergies renouvelables, alors que 20 GW de projets éoliens et solaires attendent encore une autorisation pour produire de l’énergie, le WWF propose de simplifier les procédures pour accélérer. Et de pratiquer partout la sobriété énergétique, en limitant le gaspillage énergétique des voitures SUV, en encourageant l’électromobilité légère, le vélo et le covoiturage, en éteignant aussi l’éclairage public, les bureaux et les enseignes lumineuses la nuit.
La moitié des Françaises et des Français se disent proches des idées écologistes pour cette élection, Emmanuel Macron doit pouvoir, s’il veut l’emporter au second tour, apporter dès maintenant des réponses plus détaillées et un nouveau souffle autour de l’écologie. L’avenir de la France en dépend. »