bruno Latour est mort
Les louanges pleuvent . La disparition de ce penseur laisse un vide considérable . Il a eu le temps de nous donner quelques conseils pour échapper à l’enfermement de la pensée écologique . Son dernier memo nous a chamboulé et persuadé que la future classe écologique est à naitre , loin de la gauche productiviste et soucieuse des limites de la croissance. Lisez ou relisez le memo sur la nouvelle classe écologique (14 euros seulement) DMF
Par Nicolas Truong Publié hier à 11h14, mis à jour à 01h57 Le MOnde » Philosophe, anthropologue et sociologue des sciences et des techniques, le professeur émérite associé à Sciences Po est décédé dans la nuit du 8 au 9 octobre. Son œuvre, célébrée dans le monde entier, et ses réflexions sur la crise écologique inspirent une nouvelle génération d’intellectuels, d’artistes et de militants.
Le sociologue, anthropologue et philosophe Bruno Latour est mort dans la nuit du samedi 8 au dimanche 9 octobre à l’âge de 75 ans, à Paris, a appris Le Monde de sources familiales et des éditions La Découverte. C’est l’un des intellectuels français les plus importants de sa génération qui disparaît, après une longue lutte contre la maladie. « Le plus célèbre et le plus incompris des philosophes français », avait écrit le New York Times, le 25 octobre 2018.
Célèbre et célébré à l’étranger, récipiendaire du prix Holberg (2013) et du prix de Kyoto (2021) pour l’ensemble de ses travaux, Bruno Latour fut, en effet, un temps incompris en France, tant ses objets de recherche semblaient disparates, ce qui pouvait masquer une grande cohérence. Il faut dire qu’il a touché à presque tous les domaines du savoir : l’écologie, le droit, la modernité, la religion et, bien sûr, les sciences et les techniques, avec ses inaugurales et détonantes études sur la vie de laboratoire. D’autant que, à l’exception notable de Michel Serres, avec qui Bruno Latour conçut un livre d’entretiens, Eclaircissements (François Bourin,1992), la philosophie en France s’est souvent tenue à l’écart de la pensée et de la pratique des sciences.
voici ce qu’en dit Deleage (cairn) :
« Face au désastre écologique en cours, l’impuissance des courants politiques en place est criante. Le Mémo proposé par Bruno Latour et Nikolaj Schulz propose une remise en route de l’agir politique autour de l’écologie en repensant le pouvoir et en redéfinissant un horizon politique crédible. À cette fin, ils suggèrent de réactiver l’ancienne notion de classe afin de mettre l’écologie en ordre de bataille en « simplifiant et en unifiant les mobilisations ». La classe dont il s’agit ici est la « classe écologique » qui prolonge et élargit le refus historique de la gauche d’autonomiser l’économie aux dépens des sociétés, sans partager en quoi que ce soit leur idéal productiviste. Si les préoccupations écologiques sont désormais omniprésentes, la multiplicité des conflits n’a pas, pour l’instant, pris la forme d’une mobilisation générale comme ont pu le faire par le passé les transformations dues au libéralisme ou au socialisme. Si elle veut s’autonomiser, « l’écologie doit accepter de donner un sens nouveau au terme de classe ». Et si elle souhaite hériter de la tradition matérialiste, il lui faut assumer qu’il ne s’agit plus de la même matérialité que celle de Marx pour qui il s’agissait de la matérialité des humains, car le nouveau régime climatique nous oblige aujourd’hui à redéfinir les processus par lesquels les sociétés « se reproduisent et continuent d’exister ». Or la direction de l’action s’est elle-même inversée. Naguère en effet, les énergies se mobilisaient lorsqu’il s’agissait d’accroître la production ; alors qu’il s’agit aujourd’hui de prendre conscience que la production est elle-même encastrée par d’exiguës limites planétaires…