La france vient de se retirer du traité sur l’energie . Voilà pourquoi
Emmanuel Macron a annoncé vendredi 21 octobre 2022 que la France allait sortir du traité sur la Charte de l’énergie. Ce traité, signé en 1994, est décrié par plusieurs organisations environnementales.
Explications Emile Benech dans Ouest France
Le traité sur la Charte de l’énergie (TCE), signé en 1994, pousserait les gouvernements à ne pas lancer de nouvelles lois pour lutter contre le réchauffement climatique, et irait à l’encontre des Accords de Paris, selon plusieurs organisations environnementales. Voici trois choses à savoir sur ce traité controversé.
1. Il est accusé d’entraver les actions en faveur de l’environnement
Ce traité vise à protéger les investissements internationaux dans les secteurs de l’énergie contre des décisions d’un État les remettant en cause. En cas de changements législatifs jugés négatifs, les investisseurs pouvaient alors exiger d’importantes sommes financières, jusqu’à plusieurs milliards.
Dans un avis, publié mercredi 19 octobre, le Haut conseil pour le climat estime que « les risques de contentieux induits par le mécanisme de règlement des différends du TCE peuvent constituer une entrave pour les États dans l’élaboration et la mise en œuvre de leurs politiques de décarbonation nécessaires à court terme ».
Le rapport 2022 du Giec regrette également « un haut niveau de protection des investisseurs contre une bien nécessaire action climatique, illustré par la part de plaintes réglées en faveur des investisseurs étrangers dans le cadre du traité de la Charte de l’énergie ».
Ce traité ne serait pas compatible « avec le rythme de décarbonation du secteur de l’énergie et l’intensité des efforts de réduction d’émissions nécessaires pour le secteur à l’horizon 2030 », poursuit le Haut conseil pour le climat.
2. Plusieurs États ont déjà été condamnés du fait de ce traité
En 2018, un rapport du groupe de recherche Corporate Europe Observatory comptabilisait 114 contentieux s’inscrivant dans le cadre du traité sur la Charte de l’énergie, qui aurait coûté 51,2 milliards de dollars (environ 52,34 milliards d’euros actuels) aux États concernés. « Du fait de l’opacité du système, ce nombre pourrait être bien plus élevé », précise le groupe de recherche.
Le groupe observait également une forte hausse du nombre d’affaires intentées par des investisseurs dans le cadre du TCE. Entre 1998 et 2008, 19 affaires auraient été jugées, contre 75 entre 2013 et 2017.
Par exemple, en Allemagne, le gouvernement a été condamné à verser 4,35 milliards d’euros aux exploitants de centrales à charbon après avoir voté la fin de l’exploitation de cette énergie fossile.
3. La France n’est pas le premier pays à quitter le TCE
Ce traité était loin de faire l’unanimité en Europe, et l’Italie a été le premier pays de l’Union européenne à quitter le TCE, en 2016. Mais les défections se sont accélérées depuis le début du mois d’octobre 2022.
Le parlement polonais a adopté une loi visant à se retirer officiellement du traité, et qui devra être approuvée par le Sénat pour devenir définitive. L’Espagne a lancé une procédure pour se retirer vendredi 14 octobre, suivie des Pays-Bas, mercredi 19 octobre. La France a donc suivi le mouvement, ce vendredi.
Mais sortir du TCE ne signifie pas ne plus être inquiété par ce dernier… « Une des clauses du traité prévoit d’appliquer pendant encore 20 ans le traité par le pays sorti », expliquait à Ouest-France Phuc-Vinh Nguyen, chercheur au sein de l’Institut Jacques Delors, le 24 juin 2022.