Etats d’âme. Thomas Friang , open diplomacy, la regression des ODD
| Le Cercle de Giverny se réunit au Musée des impressionnismes aujourd’hui. Je m’y rendais l’an passé avec l’enthousiasme naturel d’un des lauréats du Palmarès conduit par le Point, classé parmi les leaders engagés en matière de développement durable. L’état du jour est bien différent. Et pour cause : si l’on emploie les 17 Objectifs de Développement Durable pour comprendre l’état du monde, le constat est clair mais l’avenir est obscur. Par petites touches, les 231 indicateurs de l’Agenda 2030 dégagent un sombre tableau. Ce portrait politique de l’époque a un titre dont je vous ai déjà parlé : la grande régression. 80 % des indicateurs des ODD signent en effet la fin de l’ère du progrès. La seule transition globale que nous connaissons réellement, au fond, c’est le passage de la mondialisation heureuse à l’entrée dans l’anthropocène. Les amateurs de Monet auraient préféré une « impression, soleil levant ». Mais ce n’est pas l’aube d’une nouvelle ère qui s’esquisse depuis la pandémie et l’agression de l’Ukraine. C’est le crépuscule inconscient de la post-modernité. Car les appels à la raison ne semblent pas recevoir d’écho. Depuis plusieurs mois maintenant, le Secrétaire général des Nations unies cherche à convaincre le G20 d’adopter un « SDG Stimulus », c’est-à-dire un paquet de mesures financières permettant de ré-enclencher la mécanique du progrès. Nous avons détaillé les enjeux de ce SDG Stimulus lors d’une note présentée au président de la République le 15 juin en amont du Sommet pour un nouveau pacte financier mondial. Nous vous en reparlerons en détail mardi 5 septembre au Forum 3 Zéro organisé par Convergences où nous vous donnons rendez-vous pour une table-ronde consacrée à cette étude et aux enjeux de la prochaine Assemblée générale de l’ONU. Nous sommes à une semaine du G20 de Delhi. Les tensions géopolitiques sont telles que l’idée de cet ensemble de mesures ne fait pas l’objet de discussions, mais de rivalité pour que telle ou telle puissance soit la puissance maîtresse de la prochaine ère du progrès. Dès lors, comment, depuis Giverny, imaginer un accord à Delhi les 9 et 10 septembre et envisager une ambition mondiale lors du Sommet des ODD les 19 et 20 septembre à l’ONU ? Paradoxe. La mobilisation devrait être générale. Nous sommes à mi-parcours de l’Agenda 2030 des Nations unies. Pourtant, le risque est avéré : il est hautement probable que l’état de la planète à la fin de la décennie soit pire que la situation mondiale en 2015, selon les indicateurs des ODD. En cause ? Le retard pris dans le financement du développement durable et les conséquences de la polycrise. Au total, selon l’ONU, les besoins en investissements pour réaliser nos ambitions ont plus que doublé. Au retour de Giverny par « la Gare Saint-Lazare », autre toile iconique de l’artiste, l’ambiance est morose. Nous entrons dans une ère géopolitique si complexe qu’il peut y avoir des impressions, mais aucune ligne claire. Alors pour le quidam, faut-il s’en référer aux aphorismes du maître de Giverny ? « Tandis que vous cherchez philosophiquement le monde en soi, j’exerce simplement mon effort sur un maximum d’apparences, en étroites corrélations avec des réalités inconnues » affirmait Claude Monet. C’est une invitation à l’action individuelle, aussi vaine qu’esthétique. C’est pour nous l’occasion de rappeler l’importance d’une transformation systémique. Nous nous retrouverons pour en parler lors des prochaines Rencontres du Développement Durable, les 5 et 6 octobre. Thomas Friang Fondateur | Directeur général de l’Institut Open Diplomacy |