jean-paul Deléage nous a quitté
Jean-Paul Deléage, un écologiste de toujours
Christine Poupin,Hebdo L’Anticapitaliste – 684 (23/11/2023),
Jean-Paul Deléage, décédé le 30 octobre dernier, fut un physicien et historien de l’écologie très largement reconnu. Anecdotiquement, il est l’auteur de la phrase de Chirac au sommet de la Terre à Johannesburg en 2002 : « Notre maison brûle et nous regardons ailleurs » ! Il a aussi milité de nombreuses années à la LCR, au SNESUP puis aux Amis de la Terre.
Pour nous, il incarne une histoire militante née dans le contexte de la guerre d’Algérie et des luttes anticoloniales. Surtout, « il fut de ceux qui prirent conscience, dans les années 1970, de l’incompatibilité entre la mondialisation de notre mode de développement et la sauvegarde d’un environnement humainement viable ». (Hommage des éditions La Découverte).
Les combats contre le nucléaire
Il a été impliqué dans deux combats écologiques importants : en 1974, dans la première grande mobilisation contre l’amiante à la faculté de Jussieu, puis dans les puissantes mobilisations antinucléaires qui ont marqué les années 1970 : de Fessenheim et Bugey en 1971 à Malville en 1977 contre Superphénix endeuillée par la mort de Vital Michalon.
Non seulement il participe à convaincre la LCR de s’engager contre le nucléaire mais il donnera à cet engagement un fondement théorique et stratégique comme en témoigne son article dans Critique Communiste n° 23 de mai-juin 1978 intitulé « Énergie nucléaire et transition au socialisme »1 qui conclut : « Et le refus du nucléaire constitue, dans la pratique sociale, un renversement sans précédent des rapports jusqu’ici subordonnés des masses aux savoirs scientifiques ». Dès 1976, sa présentation du n° 7 de la revue intitulé Écologie, environnement, pollution, luttes urbaines2 montre son attention critique pour les courants écologistes. Dans le même numéro, il dialogue avec eux en plaidant pour « une approche dialectique des relations entre sociétés humaines et environnement terrestre »3.
De la LCR aux Verts, une constante implication
Ses ouvrages, Les servitudes de la puissance, une histoire de l’énergie, (1986 avec Debeir et Hémery) et Histoire de l’écologie (1991), demeurent des ressources indispensables pour les écosocialistes.
Nos chemins se sont séparés en 1988 à la suite de la campagne présidentielle de Pierre Juquin (exclu du PCF et soutenu par de nombreuses organisations dont la LCR) dans laquelle il a été très impliqué. Il rejoindra ensuite les Verts.
Quelques mois avant sa disparition, dans l’édito de la revue Écologie et Politique(créée avec Frédéric Brun en 1992), il situe la lutte contre les mégabassines dans le « fil historique des luttes contre l’accaparement privé des communs et les grands aménagements coûteux et inutiles soutenus par l’État » montrant sa constante implication.Nous lui sommes redevables du rôle très important qu’il a joué pour que notre courant politique intègre les enjeux écologiques au combat pour l’émancipation.