Nouveau désaccord avec l’UE: « C’est une fausse bonne idée » : bientôt des « mégacamions » sur les routes des Alpes-Maritimes ?
Attention le texte ne sera finalisé qu’après les élections de JUIN 2024: N’oubliez pas d’aller voter .L’europe fait votre quotidien.
Écrit par Denise DelahayePublié le 12/03/2024 à 18h50Mis à jour le 13/03/2024 à 08h26
Les députés au Parlement européen se sont prononcés ce mardi 12 mars en faveur de la circulation des poids lourds mesurant jusqu’à 25 mètres de long et pesant jusqu’à 60 tonnes, malgré des craintes sur leur impact en matière d’environnement et sécurité.
Le sujet est sensible sur tout l’arc méditerranéen. Et particulièrement dans les Alpes-Maritimes, où près de 2 millions et demi de camions transitent par l’A8 qui traverse le département. En France, le transport routier reste régi par le Code de la route qui interdit la présence de tout poids lourd ayant une charge supérieure à 44 tonnes et une longueur supérieure à 18,75 mètres.
Mais, ce mardi, le Parlement européen vient de se prononcer favorablement pour la possibilité de circulation de véhicules dits « à grande capacité » sur le territoire européen : les mégacamions.
Un mégacamion, aussi appelé « gigaliner » ou EMS (Système Modulaire Européen), est un ensemble routier motorisé qui mesure entre 18,75 mètres et 25,25 mètres de long et dont le poids peut aller jusqu’à 60 tonnes. Plusieurs pays du nord de l’Europe ont déjà depuis plusieurs années autorisé leur circulation sur leurs routes.
Le texte voté par les eurodéputés prévoit d’autoriser la circulation de ces camions entre États voisins consentants, qui les acceptent déjà sur leur territoire. Cette législation devra être négociée entre les États membres.
En France, c’est très clair, pour l’instant, c’est non.
Une majorité d’eurodéputés français se sont opposés aux mégacamions, mais leurs amendements ont été rejetés. De son côté, le Conseil européen finalisera le texte après les élections de juin 2024.
» Le trafic devrait tripler d’ici 2050″
En 2019, pour face à l’augmentation constante du trafic routier, un forum international des transports, l’ITF rassemblant 59 pays, s’est réuni. Dans son rapport, il préconise « l’utilisation de véhicules de grande capacité « , car elle « permet d’améliorer l’efficacité du transport routier, y compris sur les questions d’environnement et de sécurité ». Selon l’ITF, d’ici à 2050, le transport de marchandises devrait passer de 112 000 milliards de tonnes-kilomètres en 2015 à 329 000 milliards.
Ce rapport est un plaidoyer en faveur des mégacamions.
Du côté de l’environnement, l’ITF parle d’une réduction de 20% de CO2 en moins par tonne transportée. En ce qui concerne les transporteurs, le rapport met en avant, une réduction de la consommation de carburant et du nombre de chauffeurs nécessaires à l’unité transportée. Mais il précise que pour cela, ces professionnels doivent pouvoir profiter de la capacité de chargement supplémentaire, ce qui implique une gestion plus fine du poids et du volume. À l’énoncé de ces arguments, Patrick Mortigliengo, transporteur maralpin, hausse le ton : « Ils croient quoi ? Qu’on les a attendus ? «
« Pour économiser quoi ? »
Si le président départemental de la Fédération Nationale des Routiers ne décolère pas, c’est qu’il a plus de 40 ans d’expérience dans le transport routier. Sa société, basée à Carros dans les Alpes-Maritimes, gère une trentaine de camions qui réalisent 3 millions de km par an. « Cela fait longtemps que j’évite les kilomètres « parasites », en organisant les parcours de manière à optimiser les quantités transportées ». J’évite au maximum de déplacer un camion avec 80 % de remplissage, et je cherche à le remplir à 100% »
Cela diminue l’empreinte carbone de la tonne transportée. De plus, il change ses camions tous les 40 à 60 mois, ce qui lui permet de faire rouler des véhicules moins énergivores.
En ce qui concerne les mégacamions, il estime que les infrastructures routières françaises ne sont absolument pas adaptées à ce type de véhicules. Leur circulation augmenterait, selon lui, les risques d’accident. Quant à la formation des chauffeurs, c’est un écueil supplémentaire car « il est déjà difficile de trouver un bon chauffeur de poids lourds, alors en chercher un pour cette longueur-là, je n’imagine même pas ! »
« C’est une fausse bonne idée »
L’ancien conseiller régional délégué aux transports et actuel sénateur toujours rattaché aux transports , Philippe Tabarot, rappelle les problèmes de sécurité rencontrés par les poids lourds sur l’A8 au niveau du contournement de Nice. Depuis de très nombreuses années, les descentes de Saint-Isidore et de La Turbie, comme celle des Bréguières à Cannes, sont le théâtre de très nombreux accidents, parfois très graves.
Pour lui, des camions encore plus longs et encore plus lourds, c’est plus de danger.
Ces camions ne sont pas adaptés à notre pays, encore moins à notre région et aux Alpes-Maritimes.Philippe Tabarot, conseiller régional PACA délégué aux transports
Le sénateur se dit plutôt favorable à ce que l’on nomme « l’électrification de la route ». Pour les poids lourds, mis à part le biogaz et le biodiesel, les solutions de décarbonation envisageables sont l’électrique à batterie et réservoir d’hydrogène ou bien l’électrique à batterie et alimentation en roulant, qui est testé en Allemagne et en Suède..
Mais Philippe Tabarot constate que ces véhicules sont encore extrêmement rares et, que pour l’instant, il faut absolument développer le FRET.