défendre Watson et retrouver le chemin de la Convention Baleinière
Cette année elle se déroulait à Lima et Robin Des Bois y était: compte rendu à lire attentivement
– La résolution sur la contribution des baleines à la sécurité alimentaire s’est échouée dans les coulisses et n’a pas été présentée sur la table des débats. Malgré la propagande japonaise et norvégienne, de plus en plus de ressortissants de l’espèce humaine refusent d’intégrer la viande de baleine dans leur régime alimentaire (1). – A l’initiative de l’Union européenne, la résolution rappelant l’obligation établie par la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer de coopérer en vue de la conservation des mammifères marins et de travailler avec les organisations internationales appropriées a été acceptée par 37 voix pour, 12 contre et 8 abstentions. L’Islande, la Norvège et le Japon qui chassent ouvertement des baleines à des fins commerciales en violation du moratoire sont signataires de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer. – A l’initiative là aussi de l’Union européenne, la résolution sur l’Antarctique et la coopération entre la Commission Baleinière Internationale (CBI) et la Commission pour la conservation de la faune et la flore marines de l’Antarctique (CCALMR) reconnaissant le krill comme l’aliment essentiel des cétacés et des autres espèces marines dans l’océan Austral a été acceptée par consensus. La fringale de krill est pointée du doigt (2). – Les lustres et les tables ont vibré dans la salle des débats le 26 septembre. Ce n’était pas les applaudissements des ONG mais un tremblement de terre de magnitude 4,4. – La proposition de sanctuaire dans l’Atlantique Sud soumise par l’Argentine, le Brésil, l’Uruguay et l’Afrique du Sud a été une nouvelle fois écartée. Seules 2 voix ont manqué. La traîtrise du Bénin a été remarquée. Le commissaire béninois a voté contre alors que le président du Bénin avait affirmé à Luiz Inácio Lula Da Silva lors d’une visite officielle à Brasilia le 23 mai dernier soutenir la création de ce sanctuaire baleinier. La défaillance de la Slovénie et de l’Estonie qui n’ont pas jugé utile de venir à Lima et de la Roumanie qui n’a pas payé sa cotisation au secrétariat de la CBI a aussi pesé lourd du mauvais côté. Plus surprenant encore, le Costa Rica est resté sans voix alors qu’il se présente comme un pays leader dans la protection de la biodiversité et qu’il co-organisera avec la France le prochain Sommet des Nations Unies sur les Océans en juin 2025 à Nice. Cependant l’espérance est à l’horizon, l’Islande, pays chasseur, s’est pour la première fois abstenue, et la Corée du Sud qui votait systématiquement contre le sanctuaire depuis 2001 a voté pour (3). Le grand jour sera peut-être en Australie où se tiendra la 70ème réunion plénière de la CBI. S’il fallait accorder un prix au plus performant des pays tueurs de baleines, la palme reviendrait à la Norvège qui met dans le même caddie les baleines (25 €/kg dans les supermarchés SPAR) et les poireaux (2). La Norvège a voté contre le sanctuaire dans l’Atlantique Sud et contre la proposition de l’Union européenne réaffirmant l’importance du moratoire sur la chasse commerciale. La Norvège qui croule sous les profits de l’exploitation du gaz, du pétrole, des engrais au nitrate d’ammonium et du saumon d’élevage et qui s’apprête à affouiller ses fonds marins en Arctique pour extraire du lithium a tué 2659 petits rorquals de l’Atlantique Nord depuis 2020. Les petits rorquals sont des baleines à fanons de 8 à 12 mètres de long et de 6 à 8 tonnes. Avec un rythme de 500 baleines harponnées bon an mal an, la Norvège en a tué 2 fois plus que le Japon. Elle vient d’intégrer dans sa flotte baleinière sous le nom de Midsund un palangrier reconverti disposant de capacités de congélation et de stockage importantes. |
Midsund, 1er août 2024 © frode adolfsen |
Les baleines évoluent dans un environnement de plus en plus hostile. Elles sont physiquement confrontées aux pièges de la pêche industrielle qui prolifèrent dans les eaux côtières et en haute mer et tissent sur l’océan mondial une toile d’araignée synthétique et indétectable. Elles sont perturbées et désorientées par le vacarme des trafics maritimes et par l’extension des plateformes pétrolières, gazières et éoliennes. Elles sont sous la menace de l’extraction pionnière des ressources minières dans le fond des océans (zone Clipperton-Clarion dans l’Océan Pacifique et au large de l’archipel de Svalbard dans la Zone Economique Exclusive de la Norvège en Arctique). Les parcours des baleines sont hachés par les routes maritimes et elles sont victimes chaque année de milliers de collisions avec des navires de tous types. A titre d’exemple, 19 collisions ont été relevées pendant la course autour du monde « Ocean Race » 2023 à laquelle participaient seulement 11 voiliers et un rorqual boréal a été retrouvé mort sur l’étrave du méga-navire de croisière MSC Meraviglia au mois de mai 2024 dans le port de New York. Les prélèvements massifs des pêcheries industrielles privent les baleines de leurs proies, y compris le krill en Antarctique. En échange, l’humanité leur donne à manger des fragments de plastique et des macrodéchets. |
Le Comité Scientifique de la Commission Baleinière réalise un travail considérable à la fois d’acquisition et de synthèse des connaissances et de mise en œuvre de pratiques opérationnelles. Il a déjà formé à travers le monde 1150 professionnels aux méthodes de libération des baleines et des dauphins enchevêtrés dans des filets de pêche. Son budget a été malheureusement réduit. La délégation suisse n’a pas hésité à comparer le sort de cette indispensable institution qui réunit les meilleurs experts internationaux à celui des vaquitas, les petits marsouins menacés d’une extinction imminente dans la mer de Cortés, leur seul habitat. Pour la première fois dans l’histoire de la CBI, les travaux du Comité scientifique font l’objet d’une présentation synthétique et pédagogique disponible en anglais, en espagnol et en français (4). |
Robin des Bois à Lima : Charlotte Nithart, |